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Page:Genoude - Les Pères de l'Eglise, vol. 4.djvu/218

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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

« Fi d’un Dieu qui court les rues dans la compagnie d’une vieille femme ; fi de cet homme qui se glisse dans les maisons, ses tablettes de mendiant à la main ! »

L’allusion tombe ici sur les prêtres qui allaient quêter de porte en porte pour Cybèle. De là, l’ingénieuse réponse d’Antisthène : « Je ne me pique pas de nourrir la mère des dieux quand les dieux refusent de la nourrir[1]. » Le même poëte comique s’indigne contre une coutume de son temps, et poursuit dans le Prêtre, avec non moins de finesse que de vérité, l’aveuglement de ses contemporains :

« Si l’homme peut, avec le bruit de ses cymbales et de ses tambours, conduire le Dieu partout où bon lui semble, quiconque est armé de ce pouvoir est supérieur au Dieu lui-même. Rêves d’une folle confiance ! Pures imaginations de l’homme ! »

Mais que dis-je ? Ménandre n’est pas le seul qui tienne ce langage. Homère, Euripide, beaucoup d’autres poëtes, convainquent de néant tous vos dieux, et ne leur épargnent jamais l’ironie, dès que l’occasion s’en présente. Écoutez-les ! Ici, Minerve a le regard effronté d’un chien ; là, Vulcain boîte des deux jambes. Ailleurs, Hélène poursuit Vénus de cette imprécation :

« Puisses-tu ne jamais remettre les pieds dans l’Olympe ! »

Homère insulte ainsi ouvertement au dieu des vendanges :

« Pendant que Bacchus est en proie à ses fureurs, l’étranger souleva contre le fils de Jupiter ses nourrices égarées. Toutes jettèrent le thyrse, à l’instigation du cruel Lycurgue. »

Euripide ne se montre-t-il pas le digne élève de Socrate, lorsque, les yeux uniquement fixés sur la vérité, il brave ainsi l’opinion des spectateurs ? Tantôt il s’attaque « à cet Apollon,

  1. Plusieurs manuscrits portent la négation. Nous avons adopté cette leçon comme donnant à la réponse du philosophe quelque chose de plus piquant.