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Page:Genoude - Les Pères de l'Eglise, vol. 4.djvu/408

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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

crinière ondoyante fait reconnaître pour le roi des animaux ; c’est dire assez que dans les commencements il conserve encore quelque chose de la noble figure humaine. Bientôt il devient semblable à un dragon qui rampe sur la terre, à un sanglier qui se roule dans la fange. » Cette ressemblance de l’homme avec l’homme s’efface peu à peu ; les excès et l’intempérance la font enfin disparaître entièrement. Cet homme n’est plus même une bête forte et courageuse, c’est une eau courante ; un arbre qui ne sent pas. La source impure de ses émotions s’épuise et tarit, ses plaisirs coulent comme l’onde sans qu’il puisse les arrêter. Un calme affreux, qui annonce la mort, succède dans son cœur aux folles tempêtes de l’amour. Sa beauté se flétrit et tombe plus vite encore que les feuilles de l’arbre insensible auquel le poëte l’a comparé. Elle tombe, elle sèche, elle expire avant que son automne soit venue.

La cupidité enveloppe l’homme d’un voile de mensonge et de dissimulation, au travers duquel on ne l’apperçoit plus. Elle lui fait prendre à son gré les mille formes différentes qu’elle prend elle-même pour se l’asservir. Mais l’homme qui lui résiste, et en qui habitent la raison et le Verbe, ne change jamais. Sa forme est celle de la raison, forme simple et invariable. Il ressemble à Dieu, il est beau ; mais, pour le paraître, il ne se couvre point d’ornements frivoles ; car il sait trop bien que Dieu seul est la véritable beauté. Cet homme, enfin, devient Dieu lui-même, parce que Dieu veut qu’il le devienne.

Héraclite a dit avec raison : « Les hommes sont des dieux, et les dieux des hommes. » La double nature du Verbe nous explique ce mystère. Il est Dieu et homme, il est homme et Dieu ; et par ses intercessions en notre faveur, il accomplit la volonté de son père. La Raison ou le Verbe, qui est commun à la nature divine et à la nature humaine, est médiateur entre l’homme et Dieu. Le Verbe est le fils de Dieu, mais il est le Sauveur des hommes ; il est le ministre de Dieu, mais il est le précepteur des hommes. « La chair est esclave, dit l’apôtre saint Paul ; pourquoi donc parer une vile esclave ? » La chair est le signe et la forme de notre esclavage. « Le Seigneur, dit