l’orateur de Cirta en fait foi. Dans un jour solennel, ils se réunissent pour manger ensemble. Tous se rendent au banquet, avec leurs enfants, leurs femmes, leurs sœurs, sans distinction d’âge ni de sexe. Après avoir fait succéder les mets, lorsque le festin s’est échauffé, que l’ivresse allume leur lubricité incestueuse, ils attachent un chien au candelabre qui les éclaire et le provoquent, en lui jetant quelques mets, à s’élancer au delà de l’espace mesuré par sa chaîne ; le flambeau, témoin importun, est renversé et s’éteint ; alors ils enveloppent d’impudiques ténèbres l’infamie de leurs unions contractées dans l’ombre et au hasard. C’est ainsi qu’ils deviennent tous incestueux dans la conscience, s’ils ne le sont point tous par le fait, puisque tous désirent ce qui peut résulter de l’acte auquel ils se livrent.
X. Je ne vais pas plus loin et à dessein, je n’ai déjà que trop parlé. L’obscurité même dont s’enveloppe cette religion impie ne laisse aucun doute sur tous ces faits, ou du moins sur la plupart. Et pourquoi tant chercher à cacher, à dérober à tous les regards les objets de leur culte ? Ce qui est honnête aime le grand jour, le crime seul cherche les ténèbres. Pourquoi n’ont-ils point de temples, ni d’autels, ni d’images connus ? Pourquoi ce silence en public et ces réunions clandestines ? Il faut que ce qu’ils adorent et cachent avec tant de soin soit criminel ou honteux. D’où vient, quel est, où est enfin ce Dieu unique, solitaire, délaissé, qu’aucun état libre, aucun peuple, pas même la superstition romaine, n’a connu ? Je ne vois que la misérable nation des Juifs qui fasse profession d’adorer un seul Dieu ; du moins c’est au grand jour, elle a des temples, des autels, un culte, des sacrifices. Et toutefois ce Dieu a si peu de pouvoir, qu’il est captif des Romains aussi bien que son peuple. Mais quelles chimères, quelles absurdités ces Chrétiens n’ont-ils pas imaginées ! Ils nous disent que leur Dieu, qu’ils ne peuvent ni voir ni montrer, fait l’examen le plus exact des mœurs, de la conduite, des paroles, des pensées les plus secrètes ; qu’il se promène en tous lieux, qu’il est présent partout ; ils le font importun, inquiet, curieux jusqu’à l’effronterie, puisqu’il vous poursuit dans chacune de vos actions, dans tous les endroits