chés. L’Écriture, en effet, ne nous dit pas simplement : faites le bien, elle nous recommande en outre de diriger nos actions vers un but et de leur donner pour principe la raison. Les mains inhabiles sur la lyre ou sur la flûte doivent s’abstenir de ces instruments ; de même ceux qui ne possèdent pas la connaissance, et qui ne savent pas comment il faut user des choses de la vie pendant qu’ils sont ici-bas ne doivent pas y toucher. Ce n’est pas seulement sur les champs de bataille que les guerriers combattent pour la liberté : quiconque a reçu l’onction du Verbe, rougissant d’une noble honte à la pensée d’être traîné captif par la volupté, livre de généreux combats sur la couche de son sommeil, pendant ses repas, à la face des tribunaux. Je ne vendrai jamais ma vertu pour un injuste gain. » Qu’est-ce que ce gain injuste ? Évidemment le plaisir et la douleur, la crainte et l’angoisse, et, pour le dire en un mot, les différentes passions qui travaillent notre âme, douces dans le présent, mais pleines d’amertume le moment d’après. « Que vous sert, en effet, de gagner le monde entier, dit le Seigneur, si vous perdez votre âme ? »
Il est donc manifeste que les hommes, stériles en bonnes œuvres, ne connaissent pas ce qui leur est profitable. S’il en est ainsi, ils ne sont pas même capables de demander à Dieu ce qui est bon, puisqu’ils ignorent quels sont les vrais biens, et ils les recevraient qu’ils les posséderaient à leur insu, impuissants qu’ils sont à en faire un digne usage, et absolument étrangers par la connaissance à la manière de se servir convenablement des présents de Dieu. Or, le défaut d’instruction est la cause de l’ignorance, et c’est le propre, à mon avis, sinon d’un esprit modeste, au moins d’une bonne conscience, que de s’écrier en présence de la mauvaise fortune : « Advienne que pourra ! j’ai le bon droit de mon côté : la justice combattra pour moi, et l’on ne me surprendra jamais en défaut[1], » puisque je fais le bien. Cette bonne conscience
- ↑ Maxime empruntée à une comédie d’Aristophane, et répétée par Cicéron, livre VIII, lettre huitième à Atticus.