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Page:Genoude - Les Pères de l'Eglise, vol. 5.djvu/596

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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

impassible ; précisément en vertu de cette même impassibilité. Dieu, en effet, n’est réjoui que de notre salut.

Oui, c’est à bon droit que nous n’offrons point de sacrifices à l’être sur lequel le plaisir n’a aucune prise. Le parfum de la victime, toujours arrêté dans les régions inférieures, ne parvient que difficilement aux nuages les plus rapprochés de nous, si tant est qu’il y parvienne. Dieu n’a donc pas besoin de nos offrandes[1], et ne se laisse point charmer par le plaisir. Que lui font les richesses et les trésors de la terre ? Il possède en lui-même tous les trésors, et il prodigue à la créature indigente l’abondance de ses largesses. N’allez pas croire non plus qu’on se le rend favorable par des oblations, par des offrandes, par des honneurs, ni qu’on l’amorce par rien de semblable. Il ne se manifeste qu’aux hommes vertueux qui n’ont jamais trahi la justice par la violence des menaces ou par la séduction des promesses. Quelques esprits, fermant les yeux à la liberté humaine qui, dans les déterminations morales, ne peut être ployée sous le joug de la servitude, ont supporté avec impatience les excès d’une grossière et inhabile injustice, et se sont écriés qu’il n’y avait point de Dieu[2]. Par une opinion à peu près la même, des hommes plongés dans les désordres de l’intempérance, ou bien, travaillés par des souffrances aiguës, ou bien atteints par des catastrophes soudaines, et des revers de fortune, ne croient plus à l’existence d’un Dieu, ou n’admettent qu’un Dieu dont les regards ne s’étendent pas à toutes les créatures. D’autres s’imaginent que les dieux de leurs pensées peuvent être apaisés par des sacrifices et des offrandes jusqu’à devenir les complices de leurs passions, et ils refusent de

  1. Saint Clément, comme le prouve l’ensemble de sa pensée, ne rejette ici que les anciennes oblations de la loi, sans condamner le sacrifice de la loi nouvelle. Il ne nomme point l’Eucharistie, à laquelle il fait cependant allusion dans une autre circonstance, parce que la loi du secret ordonnait le silence sur le divin mystère.
  2. Voyez les Lois de Platon, livre X.