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DU TROISIÈME SIÈCLE.

traînait à sa suite étaient obligés de dépenser des sommes immenses pour lui procurer tous les jours de nouveaux divertissements qu’il abandonnait avec mépris à ses gardes. Ils élevaient dans chaque ville des théâtres, des palais magnifiques, que l’Empereur ne daignait pas visiter ou qu’il faisait aussitôt démolir. Les personnages les plus opulents furent ruinés par des confiscations et par des amendes, tandis que toute la nation gémissait sous le poids des impôts. Au milieu de la paix, Caracalla, pour une offense très-légère, porta une sentence de mort contre tous les habitants de la ville d’Alexandrie. Placé dans un lieu sûr du temple de Sérapis, il ordonnait et contentait avec un plaisir barbare le massacre de plusieurs milliers d’hommes, citoyens et étrangers, sans considérer le nombre de ces infortunés ni la nature de leur faute, car, comme il l’écrivait froidement au sénat, tous les habitants de cette grande ville, ceux qui avaient péri et ceux qui s’étaient échappés, méritaient également la mort.

Ce prince répétait sans cesse qu’un souverain devait s’assurer de l’affection de ses soldats et compter pour rien le reste de ses sujets. Dion appelle Caracalla la bête féroce d’Ausonie. Ce nom, donné par l’oracle, plaisait beaucoup au prince.

Il distribua des sommes immenses aux soldats, soixante-dix millions de drachmes, et cependant ce fut au milieu de l’armée que la Providence suscita contre lui Macrin, préfet du prétoire. Macrin croyant sa vie menacée, fit tuer l’empereur par Martial, soldat qui n’avait pu obtenir le grade de centurion.

Pour couronner dignement tant d’extravagance et tant de crimes, l’armée força le sénat à mettre ce monstre au rang des dieux. Après Tibère, Caligula, Néron, Domitien, on aurait pu croire que le crime était épuisé ! mais Caracalla devait encore exciter l’effroi du monde, et Héliogabale va bientôt ajouter de nouveaux traits à ce tableau de férocité par laquelle la nature humaine semble participer à la nature infernale.

Caracalla mort, les troupes n’eurent plus recours à l’autorité du sénat, elles donnèrent un chef à l’empire, un maître de l’univers. Les prétoriens, ignorant que Macrin avait ordonné la mort de leur empereur, se déclarèrent pour lui. Mais Ma-