Page:Gentil, La chute de l’empire de Rabah, Hachette, 1902.djvu/295

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riche en produits du sol que la région de l’Oubangui, offrait cependant assez de ressources en ivoire et caoutchouc, pour qu’un commerçant put y trouver profit. C’était dans cette région qu’à mon sens de Béhagle eût dû se cantonner. Malheureusement, il ne put s’y résoudre. Enthousiaste comme il l’était, avide d’aventures, son tempérament ne l’attirait pas vers le commerce, qui eût dû être son objectif principal. Il se considérait bien plus comme destiné à faire une étude et une exploration des pays du centre africain que comme le mandataire d’une société commerciale qui lui avait imposé, comme conditions, de faire avant tout des affaires.

Aussi comme à Kouno se trouvait le coursi ou envoyé du Ouadaï[1], de Béhagle s’aboucha avec lui et le pria de remettre au sultan Ibrahim, une lettre dans laquelle il lui demandait l’accès de ses territoires ; il lui proposait, comme cadeau, cinquante fusils et des munitions. Le coursi du Ouadaï qui avait reçu, à cette occasion, force cadeaux, trouva très simple, pour augmenter ses petits profits, de remettre la lettre à Gaourang.

Comme bien on pense, ce dernier ne fut pas content. Ayant reçu chez lui les Français, ayant traité avec eux, il ne devait pas penser que ces mêmes Français, essaieraient d’entrer en relations avec ses oppresseurs et surtout n’hésiteraient pas à leur fournir des armes.

À partir de ce moment, la position ne fut plus tenable pour M. de Béhagle. Constamment surveillé, il ne pouvait plus se livrer à la moindre transaction, car sur ordre du sultan, personne n’osait commercer avec lui. En conséquence de quoi, il revint au Gribingui et protesta auprès de M. Rousset dont il réclama l’intervention.

Notre agent, assez embarrassé et ne pouvant pas se rendre compte sur place de la situation, en conformité d’ailleurs avec des instructions très générales concernant M. de Béhagle, prit

  1. On sait que le Baguirmi, tributaire du Ouadaï depuis plus de soixante ans, payait, tous les trois ans, à ce dernier pays, un impôt que le sultan du Ouadaï envoyait prélever par un « coursi ».