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introduction.

avant que la tératologie pût être créée, c’est-à-dire, avant que les faits qui la composent pussent être coordonnés et compris, il fallait de toute nécessité que l’embryogénie eût révélé les véritables lois du développement des organes, et que l’anatomie comparée fût entrée dans cette direction nouvelle et philosophique où nous la voyons aujourd’hui marcher avec tant de succès et d’éclat.

C’est là un fait capital, et qu’il importe de poser dès le début de cet ouvrage. La tératologie est née après toutes les autres branches de la grande science de l’organisation, parce qu’elle devait emprunter à chacune d’elles l’une de ses bases. Elle constitue présentement un dernier progrès, préparé par les travaux de plusieurs siècles, mais qu’il n’était donné à aucune époque, la nôtre exceptée, de réaliser, et peut-être même de prévoir. Telle est, en effet, la marche constante de l’esprit humain : une découverte déjà faite est toujours le chemin d’une découverte nouvelle : chaque vérité arrive à son tour dans l’ordre des temps, comme dans une chaîne chaque anneau conduit à l’anneau qui le suit ; et les sciences elles-mêmes se lient entre lles par des rapports de subordination, et, si je puis parler ainsi, de filiation, qui apparaissent quelquefois avec évidence, mais que souvent une analyse exacte peut seule révéler.

Ces rapports de filiation, essayons de les démêler et de les suivre au milieu des diverses phases qu’a présentées la tératologie ; cherchons à apprécier l’influence qu’ont exercée sur elle les progrès successifs des autres sciences de l’organisation, subordonnées elles-mêmes aux idées générales, tour-à-tour superstitieuses et philosophiques, qui ont dominé dans chaque époque. Par là nous concevrons pourquoi la science des monstruosités, presque stationnaire pendant plusieurs siècles, a brillé tout à coup d’un vif éclat ; pourquoi les mêmes découvertes ont été souvent