L’ESPAGNE ET NAPOLÉON don Julian et nettoyer tout le pays de Salamanque (1) : 10 000 hommes sortis brusquement de la ville coupèrent les ponts de la Tormès, traquèrent les guérillas dispersées, leschassèrent des bois et les firent sabrer en plaine par les cavaliers de Fournier-Sarlovèze. Thiébault envoya alors proposer à Julian un accommodement qui flatta sa vanité mais n’aboutit pas. Don Julian figura avec sa troupe à la bataille de Fuentès de Onoro, rôda longtemps en vainqueur autour d’Avila, se mêla activement aux mouvements de l’armée anglo-portugaise et jusqu’à la fin se montra habile à harceler nos arrière-gardes. II a laissé une réputation honorable (2). Pour des motifs intimes : sa ferme détruite, sa femme et ses deux filles souillées, Caniilo Gomez, riche paysan entre Talavera et Madrid, se jeta de fureur dans la lutte et s’acharna lui aussi contre les traînards, les blessés, les malades isolés. A la tête des « Voltigeurs de Castille », il opérait dans la province de Tolède où nous le voyons proposer au général Depreux un combat à l’antique à forces égales : 300 contre 300 (3).
Frère Lucas Rafaël appartenait à un couvent de Franciscains de Castille. C’est là qu’il apprit que son père, propriétaire à Villarbasta, venait d’être fusillé après avoir refusé le serment au roi Joseph, en déclarant qu’il « ne connaissait qu’un Dieu, une loi, un souverain, qui était Ferdinand de Bourbon » . En digne fils, le moine fit un serment, quitta sa cellule, monta sur un cheval et partit prêcher la guerre sainte.
(1) THiÉBAULT, Mémoires, IV, chap. xni.
(2) « Sans doute il y a eu parmi ces bandes des hommes atroces qui ont commis des horreurs. Mais il en est aussi dont on peut citer la conduite. Le marquis de Villa-Campo, le fameux don Julian furent plutôt chefs de parti que chefs de brigands, comme nous les appelions toujours en France. Don Julian fut vraiment un homme distingué, auquel il ne manqua qu’un théatre »
Duchesse D’ABRANTÈS, Mémoires, VIII, chap. VIII.
(3) 3 mars 1811.