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Page:George Eliot Adam Bede Tome 2 1861.djvu/277

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adam bede.

avait une grange, — loin de toute maison, — comme celle du Clos de l’Abbé, et je crus pouvoir y entrer et me cacher parmi le foin et la paille, et que probablement personne ne viendrait. J’y entrai ; elle était à moitié remplie de gerbes de paille et de foin. Je me fis un lit, aussi au fond que possible, là où personne ne pourrait me trouver ; et j’étais si faible et si fatiguée que je voulais m’endormir… Mais, oh ! ces cris de l’enfant me tenaient éveillée, et je croyais que l’homme, qui m’avait tant regardée, était venu pour me prendre. Il paraît qu’à la fin je m’endormis pour longtemps, quoique je ne le susse pas, car, lorsque je me levai et sortis de la grange, je ne savais si c’était le soir ou le matin ; mais c’était le matin, car la clarté augmentait, et je retournai sur la route par où j’étais venue. Je ne pouvais m’en empêcher, Dinah ; c’étaient les cris de l’enfant qui me faisaient marcher, et pourtant j’étais effrayée jusqu’à la mort. Je pensais que l’homme en blouse me verrait et qu’il saurait que c’était moi qui avais mis l’enfant là. Mais j’avançai, malgré tout cela ; j’avais abandonné l’idée d’aller à la maison ; elle était sortie de mon esprit. Je ne voyais plus rien que cette place dans le bois où j’avais enterré l’enfant ; je la vois à présent. Oh ! Dinah, la verrai-je toujours ? »

Hetty se serra contre Dinah et frissonna de nouveau. Le silence parut long avant qu’elle continuât.

« Je ne rencontrai personne, car c’était de très-bonne heure, et j’atteignis le bois… je savais la route pour la place… la place vers le noisetier ; je l’entendais crier à chaque pas que je faisais… je pensai qu’il était vivant… je ne sais si j’étais effrayée ou satisfaite. Je ne sais ce que j’éprouvais, si ce n’est que j’étais dans le bois et que je l’entendais encore crier. Je ne sais ce que je sentais jusqu’à ce que j’aie vu que l’enfant n’était plus là. Quand je l’y avais mis, je croyais que je serais bien aise que quelqu’un le trouvât et l’empêchât de mourir ; mais quand je vis qu’il