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L’explication paraît juste Ce réservoir de fuite était placé, en effet, tout à côté de la voie d’Aquitaine, à sa sortie de la ville. On ne pouvait établir là les constructions de l’aqueduc avec autant d’aisance qu’en rase campagne. Le tracé de l’aqueduc a dû bien plutôt se plier à l’obligation de laisser intacts les monuments existants qu’il n’a forcé d’enfouir ou de renverser les obstacles sur son passage. M. Steyert se félicite beaucoup d’avoir expliqué, par la nécessité de faire passer les tuyaux, l’état de mutilation dans lequel se trouvait une série de tombeaux découverts là en 1885[1]. Cette explication n’est pas aussi simple que l’a dit son auteur. En admettant que la ligne directe qui joint les deux réservoirs coupât en effet celle des tombeaux, il est difficile, surtout du moment qu’il s’agit d’une époque de goût et de savoir-faire, de croire que le passage de quelques tuyaux ait mis l’ingénieur dans la nécessité de faire disparaître de beaux mausolées, ornement de la voie publique ; ces tuyaux pouvaient fort bien être détournés, ou soutenus par des arcades, dont il était possible d’établir les piles en ne déplaçant qu’un petit nombre de tombeaux. Ces arcades ont pu exister sans qu’on en retrouve les traces.

Entrée dans Lyon. — Le réservoir de fuite était suivi d’une nouvelle série d’arcades qui longeait la voie antique dont la trace est encore marquée aujourd’hui par la longue mais étroite rue du Juge-de-Paix. Cette rue est dirigée suivant la ligne de faîte du plateau de Fourvière jusqu’à l’esplanade où se dresse la basilique,

  1. Voici le fait et son explication (p. 267) : « Le tracé de ce nouvel aqueduc occasionna cependant un grand bouleversement a l’entrée de la ville où il aboutissait. Le point de son arrivée se trouvait exactement à la porte par où débouchaient la voie et le compendium d’Aquitaine, garnis déjà d’un double rang de monuments funéraires qu’il coupait obliquement. La pente, en cet endroit, était très abrupte au-dessous des murs de la ville ; il aurait fallu établir le rampant sur des arcades dont les piliers auraient intercepté la voie et coupé les sépultures. En présence de ce double désagrément, on résolut de niveler le terrain en pente douce et d’y faire passer les tuyaux de l’aqueduc souterrainement jusqu’à la crête du plateau où une arcade les recevait. De cette façon, les sépultures n’étaient pas détruites, mais simplement enfouies. Quant aux mausolées, ceux dont les familles existaient encore furent démolis jusqu’aux fondations ; quelques-uns, que le tracé de l’aqueduc n’atteignait pas, furent rebâtis à la même place ; d’autres, dont l’emplacement était plus ou moins occupé par le passage des conduits ou le terrain réservé à leur conservation, furent transportés ailleurs. Mais il y avait des tombeaux dont les possesseurs n’existaient plus… Ceux-là furent recouverts par l’exhaussement du sol. Ils eurent néanmoins quelque peu à souffrir, parce que le remblai ne dépassait pas uniformément leur couronnement parfois trop élevé. Néanmoins, ils furent respectés autant que possible et ne furent mutilés que partiellement. De ce nombre fut le monument fastueux du sévir Turpion, dont il fallut abattre la statue et démolir la corniche dans sa partie basse. »