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Pline et Vitruve en était déjà une preuve. Tout en cherchant à arriver dans la ville à la plus grande altitude possible, on s’attachait, dans le choix préalable des points principaux de passage, à mettre à profit les facilités offertes par la configuration générale des pays, et les variations de pente, d’un intervalle à l’autre, se pliaient, dans les conditions susdites, au choix de ces points[1]. Enfin, pour éviter certains contours démesurés, on se décidait parfois à couper court, par un siphon. Tout était bien combiné avec sagacité et méthode.

§ III. — Siphons.

Définition. Les siphons des aqueducs de Lyon. — Il a déjà été si souvent question des siphons à propos du tracé des divers aqueducs qu’il peut paraître superflu de dire en quoi ils consistent. Je rappellerai cependant qu’un siphon d’aqueduc, dans l’acception toute spéciale qu’on donne au mot en ce cas particulier, n’est pas autre chose qu’une conduite sous pression permettant de franchir avec économie d’espace et même de dépense, les vallées dont la profondeur ou la largeur nécessiterait pour la conduite libre, soit des arcades démesurées, soit d’interminables détours : une ligne tabulaire à double pente, descendant le long d’une colline pour remonter le long de la colline en face, après avoir franchi le thalweg, soit souterrainement, soit, le plus souvent, sur un pont. C’est donc, à proprement parler, comme on voit, un siphon renversé, c’est-à-dire que le coude est en bas au lieu d’être en haut. L’eau remonte dans la branche ascendante en vertu du simple principe des vases communicants. Si elle était en repos,

  1. Ainsi s’explique fort bien la pente augmentée tout d’un coup à l’aqueduc du Gier, après Bellevue, en passant dans la plaine de Taluyers (voir Pl. V, le profil en long de cet aqueduc). La pente passe brusquement de moins de 0m,50 par kilomètre à plus de 2 et 3 mètres. C’est que la plaine de Taluyers était précisément une de ces positions topographiques très importantes, dont il fallait profiter en adoptant leur pente naturelle sous peine d’augmenter outre mesure le développement et le coût du canal. Il en était de même (à l’inverse, c’est-à-dire en réduisant la pente) des plateaux de Saint-Martin et de Saint-Maurice, en amont. « Pour profiter de ces dispositions naturelles, dit Gasparin, il fallait soutenir le niveau de l’aqueduc entre Saint-Genis-Terrenoire et Bellevue, puis précipiter les pentes entre Bellevue et Orliénas. C’est justement ce qui a été fait, et on rendrait un jugement superficiel et téméraire si on accusait d’impéritie les ingénieurs romains de ce que les pentes de l’aqueduc présentent de grandes inégalités entre la première et la seconde partie de cette section du tracé. »