Page:Germaine de Stael - Lettres et pensées du maréchal prince de Ligne, Paschoud, 1809.djvu/26

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de Russie. Cela lui rapporte, et rapportera davantage. Voilà une religion, celle-là, qui comprend tant de pays et de nations différentes. Pour nos pauvres Luthériens, il y en a si peu que cela ne vaut pas la peine d’être leur Patriarche.

— Cependant, Sire, si l’on y réunissoit les Calvinistes et toutes les petites sectes bâtardes, ce seroit un assez joli poste. — Le Roi parut prendre feu à cela, et ses yeux s’animèrent. Cela ne dura pas quand je lui dis : Si l’Empereur étoit le patriarche des Catholiques, la place aussi ne seroit pas mauvaise. — Fort bien, voilà l’Europe partagée en trois Patriarches, dit-il, en riant. J’ai tort d’avoir commencé ; voyez où cela nous mène, il me semble que nos rêves ne sont pas comme ceux de l’homme de bien, ainsi que disoit M. le Régent. Si Louis XIV vivait, il nous remercieroit.

Toutes ces idées patriarcales, possibles ou impossibles à réaliser, lui donnèrent un instant un air pensif, et presque de l’humeur.

Louis XIV ayant plus de jugement que d’esprit y cherchoit plutôt l’un que l’autre. C’étoit des hommes de génie qu’il voulait et qu’il trouvait. On ne pouvait pas dire que Corneille, Bossuet, Racine et Condé fussent des hommes d’esprit. — Il y a de tout, Sire,