Page:Germaine de Stael - Lettres et pensées du maréchal prince de Ligne, Paschoud, 1809.djvu/269

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Copie d’une Lettre que j’ai écrite à l’Impératrice à Czarskozelo, de ma chambre à la sienne.


VOTRE Majesté Impériale a bien eu tort hier, et très-grand tort. Ce n’est pas en action, c’est impossible ; mais c’est en parole. Il étoit trop tard pour disputer ; cela n’étoit bon qu’en voiture. Mais il y avoit de trop deux ou trois cordons bleus, rouges, et bariolés : qu’auroient-ils dit de voir contredire l’autocratrice des Russies ? V. M. a dit, en parlant de son gouvernement : Cela irait bien mieux si j’étais homme. Eh bien point du tout. Si les Impératrices Anne et Elisabeth avoient été des hommes, leur règne eût été pitoyable : et cependant ils n’ont pas été sans gloire. Le dernier a eu de l’éclat, et a presque fait dis-paroître la barbarie. Vous parler de cet éclat, Madame, pour vous faire voir votre supériorité, ce seroit un pauvre madrigal, et mettre votre règne en parallèle avec le leur, ce seroit une épigramme et un mensonge. Un grand homme habillé comme V. M. vaut mieux qu’un grand homme le sabre au côté, car il est tenté de le tirer. C’est bien fait si son sceptre est