perſuadai facilement une fille qui auroit
été bien fâchée que mon ſilence l’eût
miſe dans la néceſſité de joindre l’effet
à la menace ; elle conſentit de reſter.
J’allois deſeſpérer de pouvoir venir à
bout de mon entrepriſe, quand j’entendis
ouvrir la porte de la chambre
d’Ambroiſe : le cœur me revint & j’atendois
avec impatience que la curioſité
de Suzon fit pour moi ce que je n’avois
pas pû faire moi-même ; les voici,
lui dis-je, en lui faiſant ſigne de ſe taire
& la remenant ſur le lit ; les voici,
ma chere Suzon. Je m’aprochai auſſi-tôt
de la cloiſon, j’écartai l’image qui
déroboit à mes regards ce qui ſe paſſoit
dans la chambre, & j’aperçus le Pere
qui prenoit ſur la gorge de Toinette des
gages peu équivoques de ſa bonne volonté.
Immobiles, ſerrez étroitement
l’un contre l’autre & receüillis en eux-mêmes,
il ſembloit qu’ils vouluſſent
par une profonde méditation, ſe remplir
de la grandeur des miſtéres qu’ils
alloient célébrer. Attentif à leurs mouvemens,
j’attendois qu’ils les pouſſaſſent
un peu plus loin, pour faire ſigne
à Suzon d’avancer. Toinette ennuyée
de la longue méditation, ſe débaraſſa
la premiere des bras du Moine, & jet-
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