que va vous cauſer la nouvelle d’une
choſe que vous n’avés jamais ſoupçonnée ;
vous n’étes pas fils d’Ambroiſe.
Je demeurai effectivement ſi interdit à
ces mots, que je n’eus pas la force d’ouvrir
la bouche. Oüi, pourſuivit le
Prieur, vous n’étes ni le fils d’Ambroiſe
ni celui de Toinette : vous étes d’une
naiſſance plus relevée, notre Piſcine
vous a vû naître, une de nos Sœurs
vous a donné le jour ; alors il me conta
ce que vous avés vû au commencement
de ces Memoires. Ah lui dis-je
alors, revenu de ma premiere ſurpriſe,
quelqu’étonnant, mon Pere, que
ſoit le miſtere que vous venés de m’aprendre,
je ſens que vous n’aurés pas
de peine à m’y faire ajoûter foi : oüi,
j’ai dans le cœur des ſentimens qui juſtifient
ma naiſſance, & ces ſentimens
ne ſe trouvent pas dans celui du fils d’un
jardinier ; mais avant que je me livre à
la joye que doit m’inſpirer la connoiſſance
de mon origine, permettés-moi de
me plaindre d’un deffaut de confiance
qui m’a ſouvent fait haïr un état auquel
j’étois deſtiné par ma naiſſance,
pourquoi m’avés-vous toûjours envié
la douce conſolation d’embraſſer ma
Mere, ſi elle vit encore : craigniés-vous
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