y livrions comme ſi nous ne les euſſions
pas encore goûtés, comme ſi nous ne
duſſions plus les goûter. Dans le feu
du plaiſir on ne ſonge guéres à ménager
les moyens de l’entretenir. L’ardeur
de Martin ne répondoit plus à la mienne,
il fallut s’arracher des bras de l’amour,
il fallut ſe retirer.
Notre bonheur ne dura guéres plus d’un mois, & j’y comprens le tems que la néceſſité faiſoit donner au repos ; quoiqu’il ne fut pas rempli par le plaiſir de voir mon amant, il l’étoit par celui de penſer à lui & par les agréables idées qui diſpoſoient mon cœur aux délices que ſa préſence ramenoit. Ah ! que les nuits heureuſes que j’ai paſſées dans les bras, ont coulés rapidement, & que celles qui les ont ſuivies ont été longues !
Redouble ton attention, ma chere Suzon, redouble-moi tes promeſſes de m’être toûjours fidelle, & de ne jamais revéler un ſecret que je n’ai jamais confié qu’à toi. Ah, Suzon qu’il eſt dangereux d’écouter un penchant trop flateur & de ſe livrer ſans refléxion. Si les plaiſirs que j’avois goûtés étoient délicieux, l’inquiétude qui les ſuivit me les fit payer bien cher. Que je me re-