Page:Gervaise de Latouche - Le Portier des Chartreux, 1889.djvu/139

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le saint prêtre pour éviter le scandale, avait attendu que la nuit fût avancée pour tenir parole à sa beauté ; qu’ayant trouvé la porte de la chambre de sa nièce ouverte, la tendresse l’avait fait courir à son lit, où il l’avait trouvée en flagrant délit ; que, frappé de l’idée d’infamie dont elle couvrait son front, il avait donné aux combattants des témoignages de sa colère plus forts que jeu. Mais le bruit redouble, on s’étrangle : eh ! vite, dame Françoise, volez sur le champ de bataille ; l’honneur, l’amour, la tendresse, tout vous en fait une loi ; allez séparer des ennemis dont la mort vous affligerait ; mais, au nom de Dieu, laissez la porte ouverte pour que je me sauve. Oh ! la chienne ! elle la ferme à double tour. Malheureux Saturnin, comment vas-tu t’échapper ? La dame Françoise va s’apercevoir que ce n’est pas avec le curé qu’elle a eu affaire, il va venir, il va te trouver, tu es perdu, tu payeras pour les autres. Telles étaient les pensées qui m’agitaient tandis qu’on se chamaillait dans la chambre voisine. Inutilement j’avais essayé de sortir ; réduit à pleurer mon triste malheur, je m’y abandonnais. Insensé que j’étais, comme si je n’eusse pas déjà éprouvé qu’au sein du malheur même on ne doit pas désespérer de sa félicité ; qu’au moment où l’on se croit accablé par les coups redoublés du sort nous devons au hasard les jours les plus fortunés. Divine Providence, c’est par tes décrets que ces merveilles s’opèrent.