Page:Gervaise de Latouche - Le Portier des Chartreux, 1889.djvu/155

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Voilà le père Chérubin : tel vous l’avez connu tel il est encore. Et le père Modeste, que vous avez vu parmi vous tout bouffi d’arrogance et d’amour-propre, son caractère est-il refondu depuis qu’il a le corps ceint d’un triple cordon ? Vous le croyez ! Moi qui le connais, je vous garantis le contraire. S’il parle, Bourdaloue près de lui ne fait que bégayer. Plus subtil que saint Thomas, il perce, raisonne, entend, pénètre. À son avis, le père Modeste est un phénix ; au vôtre, c’est un sot ; au mien, c’en est un encore. Voyez-vous le père Boniface, ce madré furet, qui penche dévotement la tête, qui tourne vers la terre des yeux mortifiés, qui semble, en marchant, composer avec le ciel ? Évitez-le, c’est un serpent qui se glisse ; il monte chez vous : veillez votre femme, serrez les filles, éloignez les garçons. Bougre, bardache, fouteur ; il est entré, il est sorti ; tâtez-vous le front : tout est foutu, tout est enculé. Vous avez fait connaissance avec le père Hilaire, serrez bien les cordons de votre bourse, vous avez affaire à un fripon. Bientôt aux conversations consolantes il fera succéder des peintures énergiques des besoins du couvent. Nous manquons de tout, vous dira-t-il, nous sommes nourris, couchés comme des chiens ; notre maison tombe en ruines. Vous vous laissez attendrir, votre bourse s’ouvre ; puisez père Hilaire vous avez trouvé votre dupe ; pillez, volez, c’est l’esprit de l’Église.