Page:Gervaise de Latouche - Le Portier des Chartreux, 1889.djvu/210

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Je fus frappé comme d’un coup de foudre à la lecture de cette lettre. Un accablement mortel m’ôta le sentiment. Ô ciel ! m’écriai-je, que devenir ? Dois-je m’exposer à la vengeance monacale ? Fuirai-je ? Malheureux, n’hésite point ; ah ! fuyons ! Mais où fuir, où me sauver ? La maison d’Ambroise s’offrit à mon esprit éperdu comme l’asile le plus sur contre la crainte présente. Je pris une résolution courageuse, trop heureux que la générosité du père André me dérobât au ressentiment monacal.

Ce ne fut pas sans douleur que je m’exilai d’un lieu où je laissais mon plaisir et mon bonheur. Déchiré par mes remords, abattu par mon désespoir, j’arrivai chez Ambroise. Toinette était seule ; mon malheur l’attendrit. Elle me secourut de son mieux et me couvrit d’un habit d’Ambroise. Je partis le lendemain pour Paris, dans l’espérance d’y trouver un état qui put me dédommager de celui que je venais de quitter.

Je partis, après avoir secoué, comme les apôtres, la poussière de mes souliers sur mon ingrate patrie ; et, marchant à pied, un bâton blanc à la main, j’arrivai à Paris. Je crus pouvoir braver alors la fureur monacale. L’argent du père André et les secours de Toinette pouvaient me conduire pendant quelque temps. Mon dessein était de chercher d’abord un poste de précepteur, en attendant que la fortune voulût m’en trouver un meilleur. Quelques connaissances que j’avais à Paris