Page:Gervaise de Latouche - Le Portier des Chartreux, 1889.djvu/80

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puisement : seul mit fin à nos transports. Enchantées l’une de l’autre, nous nous promîmes de recoucher ensemble le lendemain. Elle y revint et me rendit encore plus savante à cette seconde entrevue. Ces nuits charmantes n’ont été interrompues que par ma sortie du couvent pour venir ici.

Ce que Suzon venait de me raconter avait si fort agi sur mon imagination, que je n’avais pu refuser à l’énergie de ses discours des marques de sensibilité relative au sujet. Quoique j’eusse affecté de lui dérober les larmes qu’elle m’arrachait, le plaisir de les répandre, les regards passionnés que je jetais sur elle en les répandant, m’avaient trahi ; elle s’était aperçue de mes mouvements ; mais, charmée d’avoir fait sur moi l’impression qu’elle désirait, elle me dissimulait adroitement sa satisfaction, et, par une politique mal entendue, combattait encore en elle même le doux penchant qui devait couronner l’ardeur qu’elle m’inspirait. Autant ses discours m’avaient étonné, autant ils me donnèrent d’espoir. Ces peintures si vives et si animées des situations et des sentiments de la sœur Monique, dans une circonstance à peu près semblable à celle où nous nous trouvions, ne pouvaient partir que d’un cœur pénétré. Elle ne m’avait rien caché de ses actions, pas même sa sensibilité pour les plaisirs de l’amour. Elle avait dit tous les mots ; rien n’avait été fardé. Si nous eussions été dans l’allée, elle n’aurait pas