Page:Gervaise de Latouche - Le Portier des Chartreux, 1889.djvu/95

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que l’action vigoureuse que Toinette venait de faire l’eût épuisée, et qu’il ne lui restât plus assez de force pour marquer son mécontentement au père Polycarpe : elle le regardait tout essoufflée. Un moine ne manque guère d’impudence ; cependant celle du père ne tint pas contre la honte d’avoir été pris en flagrant délit, peut-être contre la crainte des reproches dont il croyait que Toinette allait l’accabler, ou plutôt contre l’idée d’infamie dont il croyait qu’un moine devait être noté, quand il entreprenait d’exploiter une fille sans en venir à bout. Il rougissait, il pâlissait, et n’osait presque regarder Toinette qui, de son côté, paraissait agitée des mêmes mouvements. Moi, de mon trou, je les examinais attentivement et m’attendais à être bientôt spectateur de quelque crise violente ; je le craignais. Que je les connaissais peu l’un et l’autre ! Le moine paraissait confus, mais il ne débandait pas : un moine débande-t-il jamais ? Toinette paraissait furieuse, mais elle regardait le vit du moine. Son faible était toujours de sacrifier toute sa colère à cette vue ; mon exemple devait m’avoir préparé à lui voir une pareille indulgence pour le père. Le raccommodement fut bientôt fait. Le moine s’approcha d’elle, et j’entendis qu’il lui disait, en lui mettant en main son joyeux aiguillon : Si je n’ai pas pu foutre la fille, du moins je foutrai la mère. Oh ! pour cette insulte, Toinette était toujours prête à la lui pardonner : elle s’offrit même de bonne grâce pour