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Page:Geslin, Barthelemy - Anciens eveches de Bretagne, tome 4, 1864.djvu/12

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ABBAYE DE St-RION.

richement dotée , accueillie avec sympathie par le haut clergé des environs [1] et honorée de la protection du grand pape qui dominait de si haut tous les trônes de l’Europe ; qu’une telle abbaye ait tout-à-coup disparu , sans que son nom même se trouve reproduit nulle part , c’est un fait probablement unique dans l’histoire et qui doit cacher un mystère.

Ce mystère , que plus de six siècles et demi couvrent déjà, ne sera jamais complètement dévoilé sans doute ; les historiens bretons, non plus que ceux de l’ordre de S’-Victor, ne semblent même pas l’avoir soupçonné. Toutes nos recherches à nous-mêmes pour retrouver quelque acte authentique , ou du moins quelque souvenir précis de la fin pré maturée de S’-Rion , sont restées sans résultat positif. Toutefois , parmi les chants bretons qui achèvent de s’effacer de la mémoire du peuple, il en est un qui a été recueilli au pays de Goëllo et qui nous a été communiqué par notre bien regrettable ami, de Penguern. Nous avons été tout d’abord frappés de la scène qu’il raconte , du lieu où elle se passe et du pays qui en a conservé la mémoire. Le lecteur trouvera cette pièce inédite et , à coup sûr , fort curieuse, à la suite des seuls actes que nous ayons pu réunir sur S’-Rion.

Un jeune homme pleure la mort de sa sœur, tuée par l’abbé des moines de l’Ile-Verte : l’archevêque de Dol maudit solennellement les indignes habitants de ce monastère , « jadis fondé par les Saints » [2] ; ces moines qui

  1. Deux évêques et quatre abbés avaient signé la charte de fondation.
  2. On se souvient que là fut le premier foyer de la propagande chrétienne en Armorique : là, nous avons montré saint Budoc lançant ses pieuses phalanges de missionnaires sur toutes les côtes de la Petite-Bretagne. L’Ile-Verte, à l’embouchure du Trieux , est très-proche de S’-Maudez et de S’-Rion ; le poëte breton a pu les confondre et attribuer le erime de l’une à la plus célèbre de toutes. — Lorsque , avec le gracieux concours de M. Dujardin , ingénieur en chef des Côtes-du-Nord , nous avons visité, en 1858 , ces premières stations des apôtres de l’Armorique , nous avons abordé particulièrement l’Ile-Verte avec un sentiment de pieux respect. Cet îlot est couvert des débris du cou vent de Cordeliers qui s’y établit, dit le registre de paroisse de Bréhat, en 1434, qui vit dans ses murs un chapitre général de l’ordre en 1437, et