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Les plaintes et le frôlement s’accentuèrent de plus belle.

— Tony, donc… est-ce toi ? interpella plus fort la mère, sentant un premier frisson lui courir dans le dos.

Au fond de sa pensée, elle était persuadée qu’un fantôme rôdait dans la maison… La Friquette peut-être ?… la Friquette pour sûr !… Elle en avait tant dit de mal, elle lui avait tant souhaité la damnation !

Mais pour diminuer la terreur qui la dominait, la Bardasse essayait de se dissimuler ses craintes. En toute autre circonstance, elle eût trouvé fort simple de se lever et de rallumer sa lampe à l’aide de quelques braises enfouies sous les cendres du foyer ; mais rien que de songer à mettre un pied à terre, ses cheveux se dressaient d’épouvante : si le revenant allait la toucher !

Et cependant, il fallait prendre un parti. Les bruits et les souffles devenaient de plus en plus forts et se rapprochaient sensiblement de son lit.

La vieille femme n’en pouvait plus : les quatre dents qui lui restaient s’entre-choquaient dans sa bouche sèche à l’étrangler, ses mains se cramponnaient machinalement à ses draps, et, toute suante, elle se sentait pourtant transie jusqu’aux moelles.

— Qui est-ce ? Qui est-ce ? Que voulez-vous ? Venez-vous de la part de Dieu ou de la part du diable ? balbutia-t-elle à moitié suffoquée de frayeur, espérant encore que personne ne répondrait.