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ses affaires avec une activité fébrile, vendit ses biens, rendit des avoirs mal acquis, restitua des honoraires indûment perçus, distribua des aumônes, augmenta des indemnités, etc., etc., enfin tous ceux qui se présentèrent reçurent satisfaction. Il n’y eut pas jusqu’à l’huissier Riton qui ne profita de cet élan de générosité pour faire ajouter encore quatre écus au dédommagement déjà discuté et payé de Rustique.

Puis, un beau jour, maître Thibaut congédia la Bardasse, après l’avoir largement rétribuée, et, portant une valise qui contenait le reste de sa fortune, il alla frapper à la porte de la Chartreuse de Saint-Hugon.

— C’est un pécheur qui demande l’entrée du couvent pour prier et faire pénitence, dit-il au supérieur.

— Soyez le bien venu, frère Jean, lui fut il répondu.

Pendant plusieurs années après, on donna de fortes aumônes, soit à l’abbaye même, soit à la maison de Saint-Clair, sur la Rochette, qui était une succursale. Le jour de Noël surtout, il y avait une distribution générale. C’était la fortune du frère Jean qui s’en allait en bonnes œuvres.

Cette histoire fit grand bruit dans le pays ; elle s’est conservée de mère en fille, et maintenant encore, dans les soirées d’hiver, quand il s’agit de donner une leçon de morale à une jeune fille trop coquette ou à de petits maraudeurs, la grand’mère, en tillant son chanvre, raconte la légende de la Marie aux pieds brûlés.