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HISTOIRE DE LA DÉCADENCE

II. Du temps d’Homère, la vigne croissait sans culture en Sicile, et vraisemblablement dans le continent voisin ; mais l’art ne l’avait pas perfectionnée, et les habitans de ces pays, alors barbares[1], ne savaient point en extraire une liqueur agréable. Mille ans après, l’Italie pouvait se vanter de produire plus des deux tiers des vins les plus renommés, dont on comptait quatre-vingts espèces différentes[2]. Cette denrée précieuse passa bientôt dans la Gaule narbonnaise ; mais du temps de Strabon, le froid était si excessif au nord des Cévennes, que l’on croyait impossible d’y faire mûrir le raisin[3] ; cependant on surmonta par degrés cet obstacle, et il y a lieu de penser que la culture des vignes en Bourgogne[4] est aussi ancienne que le siècle des Antonins[5].

  1. Voyez Homère, Odys., l. IX, v. 358.
  2. Pline, Hist. nat., l. XIV.
  3. Strabon, Geogr. l. IV, p. 223. Le froid excessif d’un hiver gaulois était presque proverbial parmi les anciens (*).
    (*) Strabon dit seulement que le raisin ne mûrit pas facilement (η αμπελος ο‌υ ραδιως τελεσφορει). On avait déjà fait des essais, au temps d’Auguste, pour naturaliser la vigne dans le nord de la Gaule ; mais il y faisait trop froid. (Diod. de Sicile, éd. Rhodomann, p. 304.) (Note de l’Éditeur.)
  4. Cela est prouvé par un passage de Pline l’Ancien, où il parle d’une certaine espèce de raisin (Vitis picata, vinum picatum) qui croît naturellement dans le district de Vienne, et qui, dit-il, a été transportée depuis peu dans le pays des Arvernes (l’Auvergne), des Helviens (le Vivarais), et des Séquaniens (la Bourgogne et la Franche-Comté). Pline écrivait cela l’an de J.-C. 77. (Histoire nat., l. XIV, c. 3.) (Note de l’Éditeur.)
  5. Dans le commencement du quatrième siècle, l’orateur