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HISTOIRE DE LA DÉCADENCE

guinaire Domitien, sont condamnés à une immortelle ignominie. Pendant près de quatre-vingts ans, Rome ne respira que sous Vespasien et sous Titus : si l’on en excepte ces deux règnes, qui durèrent peu, l’empire[1], dans ce long intervalle, gémit sous les coups redoublés d’une tyrannie qui extermina les anciennes familles de la république, et se déclara l’ennemie de la vertu et du talent.

Misère particulière aux Romains sous le règne des tyrans.

Tant que ces monstres tinrent les rênes de l’état, deux circonstances particulières vinrent encore aggraver la servitude des Romains, et rendirent leur position bien plus affreuse que celle des victimes de la tyrannie dans tout autre siècle et dans toute autre contrée : l’une était le souvenir de leur ancienne liberté, l’autre l’étendue de la monarchie. Ces causes produisirent la sensibilité excessive des opprimés, et l’impossibilité où ils se trouvaient d’échapper aux poursuites de l’oppresseur.

Insensibilité des Orientaux.

I. Lorsque la Perse était gouvernée par les descendans de Sefi, princes barbares, qui faisaient leurs délices de la cruauté, et dont le divan, le lit et la table, étaient tous les jours teints du sang de leurs favoris, on rapporte le mot d’un jeune seigneur, qui disait ne sortir jamais de la présence du monarque

    geras, jacent, torpentque, præterita, instantia, futura, pari oblivione dimiserat ; atque illum nemore Aricino desidem et marcentem, etc. Tacite, Hist. III, 36 ; II, 95 ; Suétone, in Vitel., c. 13 ; Dion, l. LXV, p. 1062.

  1. L’exécution d’Helvidius-Priscus et de la vertueuse Éponine déshonorent le règne de Vespasien.