Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 1.djvu/362

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à l’infâme Héliogabale d’avilir la majesté du premier corps de la nation. Sous le règne de cet indigne prince, Soœmias, sa mère, prenait séance auprès des consuls, et souscrivait comme les autres sénateurs les décrets de l’assemblée législative. Mammée refusa prudemment une prérogative odieuse et en même temps inutile. On rendit une loi solennelle pour exclure à jamais les femmes du sénat, et pour dévouer aux divinités infernales celui qui violerait par la suite la sainteté de ce décret[1]. Mammée ne s’attachait point à une vaine image ; la réalité du pouvoir était l’objet de sa mâle ambition. Elle conserva toujours sur l’esprit d’Alexandre un empire absolu ; et la mère ne put jamais souffrir de rivale dans le cœur de son fils. Ce prince avait épousé, de son consentement, la fille d’un patricien. Le respect qu’il devait à son beau-père et son attachement pour la jeune impératrice, se trouvèrent incompatibles avec la tendresse ou les intérêts de Mammée. Bientôt le patricien périt victime de l’accusation bannale de trahison ; et la femme d’Alexandre, après avoir été chassée ignominieusement du palais, fut reléguée en Afrique[2].

  1. Hist. Aug., p. 102, 107.
  2. Dion, l. LXXX, p. 1369. Hérodien, l. VI, p. 206 ; Hist. Aug., p. 131. Selon Hérodien, le patricien était innocent. L’Histoire Auguste, sur l’autorité de Dexippus, le condamne comme coupable d’une conspiration contre la vie d’Alexandre. Il est impossible de prononcer entre eux ; mais Dion est un témoin irréprochable de la jalousie et de la