Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 10.djvu/168

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ses lois et par ses préceptes, il réprimait la soif de la vengeance, et s’opposait à l’oppression des veuves et des orphelins. La foi et l’obéissance réunirent les tribus divisées, et la valeur, consumée jusque alors inutilement dans des querelles domestiques, se tourna avec énergie contre un ennemi étranger. Si l’impulsion avait été moins forte, l’Arabie, libre au dedans et formidable au dehors, aurait pu fleurir sous une longue suite de ses souverains naturels. Elle perdit sa souveraineté par l’étendue et la rapidité de ses conquêtes ; ses colonies furent dispersées en Orient et en Occident, et le sang des Arabes se mêla au sang de leurs prosélytes ou de leurs captifs. Après le règne des trois premiers califes, le trône fut transporté de Médine à la vallée de Damas et sur les bords du Tigre ; une guerre impie viola les deux cités saintes ; l’Arabie fléchit sous le joug d’un sujet, peut-être d’un étranger ; et les Bédouins du désert, revenus des chimères qu’ils s’étaient formées sur leur domination au dehors, reprirent leur ancienne et solitaire indépendance[1].

  1. Les auteurs de l’Histoire universelle moderne ont compilé (volumes 1 et 2) en huit cent cinquante pages in-folio, la Vie de Mahomet et les Annales des califes. Ils ont eu l’avantage de lire et quelquefois de corriger les textes, arabes. Mais en dépit de leur jactance, je ne trouve pas à la fin de ce morceau sur l’islamisme, qu’ils m’aient procuré la connaissance d’un grand nombre de détails, si même ils m’ont procuré la connaissance d’un seul. Cette lourde masse n’est pas animée par une seule étincelle de philosophie et