Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 10.djvu/241

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Sophronius se prosterna devant son nouveau maître, se disant en secret, selon les expressions de Daniel : « L’abomination de la désolation est dans le saint lieu[1]. » Ils se trouvèrent ensemble dans l’église de la Résurrection à l’heure de la prière ; mais le calife refusa d’y faire ses dévotions, et se contenta de prier sur les marches de l’église de Constantin. Il instruisit le patriarche du sage motif qui l’avait déterminé. « Si je m’étais rendu à vos instances, lui dit-il, sous prétexte d’imiter mon exemple, les musulmans auraient un jour enfreint les articles du traité. » Il ordonna de bâtir une mosquée[2] sur le

    employèrent le même artifice pour tenter l’orgueil de Cyrus et d’Alexandre qui venaient les subjuguer (Josèphe, Antiq. jud., l. XI, c. 1-8, p. 547, 579-582).

  1. Το βδελυγμα της ερημοσεως το ρηθεν δια Δανιηλ το‌υ προφητο‌υ, εσ‌τως τοπω αγιω. (Théoph., Chronogr., p. 281.) Sophronius, l’un des théologiens qui montrèrent le plus de profondeur dans la controverse des monothélites, fit reservir dans la circonstance présente cette prédiction qui avait déjà été appliquée à Antiochus et aux Romains.
  2. D’après les calculs exacts de d’Anville (Dissert. sur l’ancienne Jérusalem, p. 42-54), la mosquée d’Omar, qui fut agrandie et embellie par les califes ses successeurs, occupait sur le terrain de l’ancien temple de Salomon (παλαιον το‌υ μεγαλο‌υ ναο‌υ δαπεδον, dit Phocas), un espace en longueur de deux cent quinze, et en largeur de cent soixante-douze toises. Le géographe de Nubie assure que cette magnifique construction n’était surpassée en étendue et en beauté que par la grande mosquée de Cordoue (p. 113), que M. Swinburne a représentée avec tant d’élégance dans son état actuel (Travels into Spain, p. 296-302).