Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 10.djvu/284

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long-temps, que parce qu’il espérait qu’un disciple zélé vengerait dans le sang du perfide l’outrage fait à la religion. Il servit ensuite avec succès et avec une apparence de fidélité une religion qu’il n’avait plus intérêt d’abandonner : son extraction et ses talens le placèrent à un rang honorable parmi les Koreishites ; et chez un peuple qui était presque toujours à cheval, on le cita pour le plus habile et le plus courageux des cavaliers. Il partit de l’Égypte à la tête de quarante mille musulmans, et pénétra dans les régions inconnues de l’Occident. Les sables de Barca purent arrêter une légion romaine, mais les Arabes, suivis de leurs fidèles chameaux, virent sans frayeur un sol et un climat qui ressemblaient aux déserts de leur pays. Après une pénible marche, ils campèrent devant les murs de Tripoli[1], ville maritime, où avaient reflué peu à peu les habitans et la richesse de la province dont elle avait seule con-

  1. Léon l’Africain (in Navigazione e Viaggi di Ramusio, t. I, Venise, 1550, fol. 76, verso) et Marmol (Description de l’Afrique, t. II, p. 562) ont décrit la province et la ville de Tripoli. Le premier était un Maure qui avait du savoir et qui avait voyagé ; il composa ou traduisit la Géographie de l’Afrique à Rome, où il se trouvait captif, et où il venait de prendre le nom et la religion du pape Léon X. L’Espagnol Marmol, soldat de Charles-Quint, était captif chez les Maures lorsqu’il compila sa Description de l’Afrique, que d’Ablancourt a traduite en français (Paris, 1667, 3 vol. in-4o). Marmol avait lu et observé ; mais il n’a pas cet esprit curieux et étendu qu’on remarque dans l’écrit de Léon l’Africain.