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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 10.djvu/308

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l’espoir que pouvait leur offrir une révolution ; et Oppas leur oncle, archevêque de Tolède et de Séville, était la première personne de l’Église et la seconde de l’état. Il est vraisemblable que Julien se trouvait enveloppé dans la ruine de cette faction malheureuse ; qu’il avait beaucoup à craindre et peu à espérer du nouveau règne, et que l’imprudent Roderic ne pouvait sur le trône ni oublier ni pardonner les outrages qu’avait reçus sa famille. Le mérite et l’influence de Julien en faisaient un sujet utile, mais redoutable ; il avait de grands biens, des partisans audacieux et en grand nombre, et malheureusement il a trop fait voir que, maître de l’Andalousie et de la Mauritanie, il tenait en ses mains les clefs de la monarchie d’Espagne. Trop faible cependant pour déclarer la guerre à son souverain, il chercha le secours d’une puissance étrangère, et en appelant imprudemment les Maures et les Arabes, il produisit huit siècles de calamités ; il les instruisit, dans ses lettres ou dans une conférence, de la richesse et du peu de force de son pays, de la faiblesse d’un prince peu chéri du peuple, et de l’état de dégénération où se trouvait ce peuple efféminé. Les Goths n’étaient plus ces Barbares victorieux qui avaient humilié l’orgueil de Rome, dépouillé la reine des nations, et qui s’étaient avancés triomphans du Danube à la mer Atlantique ; séparés par les Pyrénées du reste du monde, les successeurs d’Alaric s’étaient endormis dans une longue paix. Les murs des villes tombaient en ruines ; les jeunes citoyens avaient abandonné l’exercice des armes, et