Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 10.djvu/375

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vemens. Ces richesses diviseront leurs conseils, et assureront votre victoire. » Cette politique subtile est peut-être de l’invention des écrivains arabes, et la situation de Charles, peut faire supposer à ses délais un motif moins noble et plus personnel, le secret désir d’humilier l’orgueil et de ravager les provinces du rebelle duc d’Aquitaine. Il est cependant plus vraisemblable que les délais de Charles furent forcés et contraires à son désir. La première et la seconde race ne connaissaient point les armées permanentes ; les Sarrasins étaient alors les maîtres de plus de la moitié du royaume ; selon leur position respective, les Francs de la Neustrie et ceux de l’Austrasie se montrèrent trop effrayés ou trop peu occupés du danger qui les menaçait : et les secours accordés volontairement par les Gépides et les Germains, avaient beaucoup de chemin à faire pour se rendre au camp des chrétiens. Dès que Charles Martel eut rassemblé ses forces, il chercha l’ennemi et le trouva au milieu de la France, entre Tours et Poitiers. Sa marche bien calculée avait été couverte par une chaîne de collines, et il paraît qu’Abderame fut surpris de son arrivée inattendue. Les nations de l’Asie, de l’Afrique et de l’Europe marchaient avec la même ardeur à une bataille qui devait changer la face du monde. Les six premiers jours se passèrent en escarmouches, où les cavaliers et les archers de l’Orient eurent l’avantage ; mais dans la bataille rangée qui eut lieu le septième, les Orientaux furent accablés par la force et la stature des Germains, dont les cœurs inébran-