Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 11.djvu/134

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s’approcher en ennemi, ils fléchirent le genou sans honte et sans répugnance devant leur père spirituel. Mais le pape fut inexorable ; ses Allemands, fiers de leur haute taille, se moquèrent de la petite stature de leurs adversaires ; et on déclara à ceux-ci qu’ils devaient choisir entre la mort et l’exil. Les Normands dédaignaient la fuite, et plusieurs d’entre eux n’ayant pas pris de nourriture depuis trois jours, leur petite armée se décida pour une mort plus prompte et plus honorable. Après avoir monté la colline de Civitella, ils descendirent dans la plaine, et chargèrent, en trois divisions, les troupes du pape. [Sa défaite et sa captivité. Juin 18.]Richard, comte d’Averse et le fameux Robert Guiscard, qui étaient à la gauche et au centre, attaquèrent, enfoncèrent, mirent en déroute et poursuivirent les troupeaux d’Italiens qui combattaient sans discipline et fuyaient sans rougir. Le comte Humphroy, qui menait la cavalerie de l’aile droite, eut à remplir une tâche plus difficile. On a représenté les Allemands comme peu habiles[1] à manier la lance et le cheval ; mais ils formaient à pied une impénétrable phalange, et ni homme, ni cheval, ni

  1. Teutonici quia Cæsaries et forma decoros
    Fecerat egregie proceri corporis illos
    Corpora derident Normannica quæ breviora
    Esse videbantur.

    Les vers de l’Apulien ont ordinairement cette platitude ; mais il s’échauffe dans la description de la bataille. Deux de ses comparaisons, tirées de la chasse au faucon et de la sorcellerie, indiquent les mœurs de son temps.