Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 11.djvu/396

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ces amazones lui firent donner le surnom de la dame aux pieds d’or.

Passage des croisés dans les états de l’empereur grec.

II. Le nombre et le caractère des croisés étaient un objet de terreur pour les Grecs efféminés, et l’objet de notre crainte devient facilement celui de notre aversion. Mais la frayeur que leur inspirait la puissance des Turcs assoupit pour quelque temps ces sentimens de haine ; malgré les invectives des Latins, nous croyons pouvoir assurer qu’Alexis dissimula leurs insultes, éluda leurs hostilités, dirigea leur imprudence, et ouvrit à leur courage la route du pèlerinage et de la conquête. Mais dès que les sultans eurent été chassés de Nicée et des côtes maritimes, dès que, retirés dans Cogni, ils n’alarmèrent plus de leur voisinage les empereurs de Byzance, les Grecs se livrèrent davantage à l’indignation que leur causait le fréquent et libre passage des Barbares d’Occident qui menaçaient la sûreté de l’empire et insultaient à sa majesté. Les seconde et troisième croisades furent entreprises sous les règnes de Manuel Comnène et d’Isaac l’Ange. Le premier à des passions toujours impétueuses joignit souvent les sentimens d’une âme malveillante. Le second, modèle de lâcheté et de perfidie, avait puni sans mérite comme sans pitié le tyran dont il occupait alors la place. Le prince et le peuple convinrent secrètement, et peut-être tacitement, de détruire ou au moins de décourager les pèlerins par toutes sortes d’injures et de tyrannies ; leur défaut de prudence et de discipline en fournissait continuellement le pré-