Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 12.djvu/170

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

servit qu’à faire éclater la patience de leur souverain. La philosophie de notre siècle pardonnera sans doute à ce prince un seul vice racheté par une foule de vertus ; et les contemporains de Vatacès accordèrent à ses fautes ainsi qu’aux passions plus impétueuses de Lascaris, une indulgence due aux restaurateurs de l’empire[1]. Les Grecs qui gémissaient encore sous le joug des Latins, privés de lois et de tranquillité, vantaient le bonheur de ceux qui avaient recouvré la liberté nationale, et Vatacès, par une louable politique, eut soin de les convaincre qu’il était de leur intérêt de passer sous son gouvernement.

Théodore Lascaris II. A. D. 1255. Oct. 30. A. D. 1259. Août.

La dégénération se fait fortement sentir entre Jean Vatacès et Théodore, son fils et son successeur, du fondateur de l’empire qui sut en soutenir le poids, à l’héritier qui ne fit que jouir de son éclat[2]. Cependant le caractère de Théodore ne manquait pas d’énergie ; il avait été élevé à l’école de son père et dans l’exercice des armes et de la chasse. Constantinople ne tomba point encore ; mais dans les trois années

  1. Comparez Acropolita (c. 18-52) avec les deux premiers livres de Nicéphore Gregoras.
  2. Un proverbe persan dit que Cyrus fut le père de ses sujets, et que Darius en fut le maître. On appliqua ce proverbe à Vatacès et à son fils ; mais Pachymères a confondu Darius, prince humain, avec Cambyse, despote et tyran de son peuple. Le poids des taxes avait fait donner à Darius le nom moins odieux mais plus méprisable de Καπηλος, marchand ou courtier (Hérodote, III, 89).