Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 12.djvu/30

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

nard, comme politique et comme orateur. Un prêtre ignorant, des environs de Paris, Foulques[1] de Neuilly, abandonna le service de sa paroisse pour le rôle plus flatteur de missionnaire ambulant et de prédicateur du peuple. La réputation de sa sainteté et de ses miracles se répandit au loin ; il déclamait avec véhémence contre les vices du siècle, et les sermons qu’il prêchait à Paris, en pleine rue, convertirent des voleurs, des usuriers, des filles publiques et jusqu’à des docteurs et des écoliers de l’université. À peine Innocent III avait pris possession de la chaire de saint Pierre, qu’il fit proclamer en Italie, en Allemagne et en France la nécessité ou l’obligation d’une nouvelle croisade[2]. L’éloquent pontife déplorait pathétiquement la ruine de Jérusalem, le triomphe des païens et la honte de la chrétienté : sa libéralité proposait la rémission des péchés et une indulgence plénière à tous ceux qui serviraient dans la Palestine une année en personne ou deux ans par un substitut[3]. Parmi les légats et les orateurs qui entonnè-

  1. Voyez Fleury (Hist. ecclés., t. XVI, p. 26, etc.), et Villehardouin, no 1, avec les Observations de Ducange, que je suis toujours censé citer avec le texte original.
  2. La Vie contemporaine du pape Innocent III, publiée par Baluze et Muratori (Script. rerum ital., t. III, part. I, p. 486-568), est très-précieuse par l’importance des instructions insérées dans le texte ; on peut y lire la bulle de la croisade, c. 84, 85.
  3. « Porce cil pardon fut issi gran, se s’en esmeurent