Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 12.djvu/361

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les écoles de la Perse à révérer la mémoire d’Ali et d’Hosein, et à considérer les Syriens comme les ennemis jurés du petit-fils de Mahomet. Il fit à ses docteurs une question captieuse que les casuistes de Bochara, de Samarcande et de Hérat n’étaient point capables de résoudre. « Qui sont, leur demanda-t-il, les véritables martyrs, des soldats qui sont tués de mon côté ou de ceux qui meurent du côté de mes ennemis ? » Mais un des cadis sut adroitement le satisfaire ou lui fermer la bouche, en lui répondant selon les expressions de Mahomet lui-même, que c’est l’intention qui constitue le martyr, et que les musulmans des deux partis, s’ils ont combattu pour la gloire de Dieu, peuvent également mériter ce titre. La succession légitime du calife paraissait plus difficile à décider, et le vainqueur, irrité de la franchise d’un docteur trop sincère pour sa situation, s’écria : « Tu es aussi faux que ceux de Damas ; Mohawiyah n’était qu’un usurpateur, et Yezid un tyran ; Ali seul est le véritable successeur de Mahomet. » Une interprétation prudente calma sa colère, et il passa à des sujets de conversation plus familiers ; « Quel âge avez-vous ? dit-il au cadi. — Cinquante ans. Mon fils aîné serait de votre âge. Vous me voyez, continua Timour, je ne suis qu’un misérable mortel, boiteux et décrépit ; cependant il a plu au Tout-Puissant de me choisir pour subjuguer les royaumes d’Iran, de Touran et des Indes. Je ne suis point un homme féroce ; Dieu m’est témoin que dans mes différentes guerres, je n’ai jamais été l’agresseur, et que