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de la violente querelle de Boniface VIII et du roi de France[1]. [Boniface VIII. A. D. 1294-1308.]Aux armes spirituelles du pape, l’excommunication et l’interdit, on opposa l’union des trois ordres du royaume et les priviléges de l’Église gallicane ; mais le pape ne put se soustraire à d’autres armes plus réelles que Philippe-le-Bel eut le courage d’employer. Il résidait à Agnani, sans prévoir le danger qui le menaçait. Son palais et sa personne furent attaqués par trois cents cavaliers, que Guillaume de Nogaret, ministre de France, et Sciarra Colonna, noble Romain, ennemi du pape, avaient levés secrètement. Les cardinaux prirent la fuite, les habitans d’Agnani oublièrent la fidélité et la reconnaissance qu’ils devaient à leur souverain. Seul et sans armes, l’intrépide Boniface s’assit dans son fauteuil, et, à l’exemple des anciens sénateurs, attendit le glaive des Gaulois. Nogaret, étranger à l’ennemi qu’il combattait, se contenta d’exécuter les ordres de son maître ; Colonna accabla d’injures et de coups le pontife qu’il haïssait personnellement ; et durant sa captivité, qui fut de trois jours, tous deux sans cesse occupés à irriter son opiniâtreté, la provoquèrent par de mauvais traitemens qui mirent sa vie en

  1. Outre les historiens généraux de l’Église d’Italie et de France, nous avons un Traité précieux, composé par un savant, ami de M. de Thou. Il a pour titre Histoire particulière du grand différend entre Boniface VIII et Philippe-le-Bel, par Pierre Dupuis, t. VII, part. II, p. 61-82 et on l’a inséré dans l’Appendix des dernières et meilleures éditions de l’histoire du président de Thou.