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occasions, donnèrent à la chevalerie française une force invincible. De ce côté, cependant, les desseins d’Eugène et l’éloquence de son légat, le cardinal Julien, furent soutenus par des circonstances favorables[1], la réunion des deux couronnes sur la tête de Ladislas[2], guerrier jeune et ambitieux, et la valeur d’un héros, Jean Huniades, dont le nom était déjà fameux parmi les chrétiens et redoutable aux Turcs. Le légat répandit un inépuisable trésor de pardons et d’indulgences ; un grand nombre de guerriers allemands et français s’enrôlèrent sous l’étendard sacré, et de nouveaux alliés d’Europe et d’Asie rendirent ou firent paraître la croisade un peu plus formidable. Un despote fugitif de Servie exagéra la détresse et l’ardeur des chrétiens qui habitaient au-delà du Danube ; ils avaient, disait-il, unanimement résolu de défendre leur religion et leur liberté. L’em-

  1. Pour la croisade de Hongrie, Spondanus (Ann. ecclés., A. D. 1443-1444) m’a servi de guide. Il a lu avec soin et comparé en critique les écrits des Grecs et ceux des Ottomans, les historiens de Hongrie, de Pologne et de l’Occident. Son récit est clair, et lorsqu’il peut se dépouiller des préjugés religieux, son jugement n’est pas à mépriser.
  2. J’ai supprimé dans le nom de Ladislas la lettre W, par laquelle la plupart des écrivains le commencent (Wladislas), soit pour se conformer à la prononciation polonaise, ou pour le distinguer de l’infant Ladislas d’Autriche son rival. Callimaque (l. I, part. II, p. 447-486), Bonfinius (Dec. III, l. IV), Spondanius et Lenfant parlent en détail de leur concurrence pour le trône de Hongrie.