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trouvés jusqu’alors dans les états voisins, ils se virent de toutes parts enfermés dans le cercle de fer du despotisme. L’éducation et l’habitude de l’obéissance subjuguèrent à la longue l’esprit turbulent de la noblesse et des communes de Rome. Les barons oublièrent les guerres et les factions de leurs aïeux ; le luxe et le gouvernement les asservirent peu à peu à leur empire. Au lieu de soutenir à leurs frais une multitude de partisans et de satellites, ils employèrent leurs revenus à ces dépenses particulières qui multiplient les plaisirs et diminuent le pouvoir du propriétaire[1]. Les Colonne et les Ursins ne luttèrent plus que sur la décoration de leurs palais et de leurs chapelles ; et l’opulence subite des familles pontificales égala ou surpassa leur antique splendeur. On n’entend plus à Rome la voix de la liberté ni celle de la discorde, et au lieu d’un torrent écumeux, elle n’offre plus qu’un lac uni et stagnant où se peint l’image de l’oisiveté et de la servitude.

Le gouvernement ecclésiastique.

La domination temporelle du clergé scandalise également le chrétien, Ic philosophe et le patriote[2].

  1. Le docteur Adam Smith (Wealth of Nations, vol. I, p. 495-504) expliqua d’une manière admirable le changement des mœurs et les dépenses qu’amène ce progrès de la civilisation. Il prouve avec trop de sévérité peut-être, que ce sont les vues les plus personnelles et les moins nobles qui ont en les effets les plus salutaires.
  2. Hume (History of England, vol. I, p. 389) conclut trop légèrement que si la même personne réunit le pouvoir civil et le pouvoir ecclésiastique, il importe peu de lui don-