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étaient réunies dans la personne de Carus. Malgré la justice sévère qu’il exerça contre les assassins de Probus, dont l’estime et la faveur lui avaient été utiles, il fut soupçonné d’avoir participé à un crime qui lui frayait le chemin au trône. Il jouissait, du moins avant son élévation, d’une grande réputation de mérite et de vertu[1] ; mais l’austérité de son caractère dégénéra insensiblement en aigreur et en cruauté. Les historiens de sa vie sont presque disposés à le mettre au rang des tyrans de Rome[2]. Carus avait environ soixante ans lorsqu’il prit la pourpre et ses deux fils, Carin et Numérien, étaient déjà parvenus à l’âge d’homme[3].

Sentimens du sénat et du peuple.

On vit expirer avec Probus l’autorité du sénat. À la mort de ce prince, le repentir des troupes ne les porta point aux mêmes égards qu’elles avaient eus pour la puissance civile après le meurtre d’Aurélien. Elles avaient donné la pourpre à Carus sans attendre l’approbation du sénat. Le nouvel empereur se contenta d’annoncer par une lettre froide et hau-

  1. Probus avait demandé au sénat que l’on élevât à Carus, aux dépens du public, une statue équestre et un palais de marbre, comme une juste récompense de son mérite extraordinaire. Vopiscus, Hist. Aug., 249.
  2. Vopiscus, Hist. Aug., p. 242, 249. Julien exclut l’empereur Carus et ses fils du banquet des Césars.
  3. Jean Malala, tom. I, p. 401. Mais l’autorité de ce Grec ignorant est très-faible : il fait venir ridiculement de Carus la ville de Carrhes et la Carie, province dont Homère a parlé.