Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 2.djvu/60

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facile d’en exagérer les effets que de les déterminer avec précision. Quelques écrivains ont supposé, et ils croyaient tous pour la plupart, quoique peut-être sans aucune preuve suffisante, que le froid rigoureux du nord contribuait à la longue vie des habitans, et favorisait la propagation de l’espèce ; que les hommes de ces contrées étaient plus propres à la génération, et les femmes plus fécondes que dans les climats chauds et tempérés[1]. Nous pouvons avancer avec plus d’assurance que les peuples du septentrion avaient reçu de la nature de grands corps et une vigueur inépuisable, et qu’ils avaient en général sur ceux du midi l’avantage d’une taille élevée[2]. L’air âpre de la Germanie donnait aux naturels une sorte de force plus faite pour les exercices violens que pour un travail soutenu. Il leur inspirait une intrépidité qui résultait de leurs fibres et de leur organisation particulière. En temps de guerre, ces robustes enfans du nord[3] sentaient à peine les rigueurs d’un hiver qui glaçait le courage du soldat romain. Incapables, à leur tour, de résister aux grandes chaleurs, ils éprouvaient,

  1. Olaus-Rudbek assure qu’en Suède les femmes ont dix ou douze enfans, et quelquefois vingt ou trente, mais l’autorité de Rudbek est très-suspecte.
  2. In hos artus, in hæc corpora, quæ miramur excrescunt. Tacite, Germ., III, 20. Cluvier, l. I, c. 14.
  3. Plutarque, Vie de Marius. Les Cimbres s’amusaient souvent à descendre, sur leurs larges boucliers, des montagnes de neige.