Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 3.djvu/261

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la prudence, admirèrent la ferveur divine de son zèle ; et les louanges excessives qu’ils prodiguèrent à la mémoire de leur héros et de leur martyr, laissèrent dans l’esprit de Dioclétien une impression profonde de terreur et de haine[1].

Les chrétiens sont accusés d’avoir mis le feu au palais de Nicomédie.

Ses craintes furent augmentées par un danger auquel il n’échappa qu’avec peine. Dans l’espace de quinze jours le feu prit deux fois au palais de Nicomédie, même à la chambre de Dioclétien ; et quoique ces deux fois on l’éteignît avant qu’il eût causé aucun dommage considérable, ce renouvellement singulier du même accident parut, avec raison, une preuve évidente qu’il n’avait point été l’effet du hasard ou de la négligence. Le soupçon tombait naturellement sur les chrétiens. On insinua, non sans quelque probabilité, que ces fanatiques, animés par le désespoir, irrités par leurs souffrances, et redoutant de nouvelles calamités, avaient conspiré avec leurs frères les eunuques du palais contre la vie des deux empereurs, qu’ils détestaient comme les ennemis irréconciliables de l’Église de Dieu. L’inquiétude et le ressentiment s’emparèrent de tous les esprits, et particulièrement de celui de Dioclétien. Plusieurs

  1. Lactance l’appelle seulement quidam, etsi non rectè, magno tamen animo, etc. c. 12. Eusèbe (l. VIII, c. 5) le décore des dignités du siècle. Ni l’un ni l’autre n’ont daigné rapporter son nom ; mais les Grecs célèbrent sa mémoire sous celui de Jean. Voyez Tillemont (Mém. ecclés., t. 5, part. II, p. 320).