Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 3.djvu/30

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après le retour de l’Église de Jérusalem, il s’éleva une question qui devint un sujet de doute et de controverse : il s’agissait de décider si un homme qui reconnaissait sincèrement Jésus pour le Messie, mais qui persistait toujours à observer la loi de Moïse, pouvait espérer d’être sauvé. L’humanité de saint Justin martyr le faisait pencher pour l’affirmative ; et tout en s’exprimant avec la défiance la plus réservée, il osa prononcer en faveur de ces chrétiens imparfaits, pourvu qu’ils se contentassent de pratiquer les cérémonies de Moïse, sans prétendre que l’usage dût en être général ou nécessaire[1]. Mais lorsqu’on

    mon entre autres développa cet argument dans toute sa force ; Dœderlein et d’autres théologiens modernes se sont appliqués à prouver que les ébionites étaient faussement inculpés à cet égard. Commentarius de ebionæis, 1770, §. 1-8. (Note de l’Éditeur.)

  1. Saint Justin le martyr fait une distinction importante, que Gibbon a négligé de rappeler. Les premiers Juifs chrétiens avaient été nommés ébionites, et s’étaient retirés à Pella ; ceux que l’évêque Marcus engagea à abandonner, du moins en partie, la loi mosaïque et à revenir à Jérusalem, s’appelèrent nazaréens ; ceux qui persistèrent dans leur judaïsme conservèrent le nom d’ébionites. Ceux-ci sont les seuls que saint Justin le martyr repousse de l’Église et blâme avec une grande sévérité ; il montre plus d’indulgence pour les nazaréens, qui, tout en observant encore à plusieurs égards la loi de Moïse, n’obligeaient pas les païens convertis à la suivre, tandis que les ébionites proprement dits voulaient les y contraindre : cette différence paraît avoir été la principale qui existât entre les opinions de ces deux sectes. Voyez Dœderl. précité, p. 25. (Note de l’Éditeur.)