Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 3.djvu/62

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plus féroces Barbares accourus des extrémités du Nord, la peste et la famine, les comètes et les éclipses, les tremblemens de terre et les inondations, tout présageait une révolution terrible[1]. Ces signes effrayans n’étaient que les avant-coureurs de la grande catastrophe. L’instant fatal approchait où la patrie des Scipions et des Césars devait être consumée par une flamme descendue du ciel ; où la ville aux sept collines, ses palais, ses temples et ses arcs de triomphe, devaient être bientôt ensevelis dans un lac immense de feu et de bitume ; et le monde, qui avait déjà péri par l’eau, devait éprouver une destruction plus prompte par le feu. Ce qui pouvait apporter quelque consolation à la vanité des Romains, c’est que le terme de leur empire devait être en même temps la fin de l’univers. Dans cette opinion d’un incendie général, la foi des chrétiens coïncidait heureusement avec la tradition de l’Orient, la philosophie des stoïciens, et les analogies naturelles. Le pays même où la religion plaçait l’origine et la principale scène de l’embrasement, avait été singulièrement disposé par la nature pour ce grand événement. Il renfermait dans son sein de profondes cavernes, des lits de soufre et de nombreux volcans que l’Etna, le Vésuve et les îles de Lipari, représentent d’une manière très-imparfaite. Aux yeux même du sceptique le plus calme et le plus intrépide, l’opinion que

  1. Lactance (institut. div., VII, 15, etc.) parle de cet affreux avenir avec beaucoup de feu et d’éloquence.