Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 4.djvu/282

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religion, dans la même société civile, dans les mêmes craintes et les mêmes espérances pour cette vie et pour celle qui doit la suivre. De quelque côté que fût l’erreur, elle pouvait être innocente dans les deux opinions. La foi pouvait être sincère et la pratique vertueuse ou corrompue. Les passions des deux partis étaient excitées par les mêmes objets ; ils pouvaient alternativement abuser de la faveur de la cour ou de celle du peuple. Les opinions métaphysiques des disciples d’Arius ou de saint Athanase ne changeaient pas leur caractère moral, et ils étaient également animés par l’esprit d’intolérance que le fanatisme a su tirer des maximes pures et simples de l’Évangile.

Le paganisme toléré.

L’auteur moderne d’une histoire, qu’avec une juste confiance il a honorée du titre de politique et philosophique[1], accuse Montesquieu d’une réserve timide, parce qu’au nombre des causes qui ont entraîné la décadence de l’empire, il n’a pas compris une loi de Constantin qui supprimait absolument le culte des païens, et laissait une grande partie de ses peuples sans prêtres, sans temples, et sans religion publique. Le zèle de cet écrivain philosophe pour les droits de l’humanité, l’a fait acquiescer au témoignage équivoque des ecclésiastiques qui ont trop légèrement attribué à leur héros favori le mérite d’une persécution générale[2]. Au

  1. Histoire politique et philosophique des établissemens des Européens dans les Deux-Indes, t. I, p. 9.
  2. Selon Eusèbe (in vit. Const., l. II, c. 45), l’empereur