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exploits ; mais les dieux trouvent que le modeste silence de Marc-Aurèle parle mieux en sa faveur que les discours travaillés de ses orgueilleux rivaux. Lorsque les juges de cet imposant concours viennent à examiner le cœur et à scruter les motifs des actions de tous ces princes, la supériorité du stoïcien empereur se montre d’une manière encore plus décisive et plus éclatante[1]. Alexandre et César, Auguste, Trajan et Constantin, avouent en rougissant que la réputation, la puissance ou le plaisir, ont été les premiers objets de leurs travaux ; mais les dieux eux-mêmes contemplent avec respect et avec amour un mortel vertueux qui a pratiqué sur le trône les leçons de la philosophie, et qui, malgré notre imperfection, n’a pas craint d’aspirer aux attributs moraux de l’Être suprême. Le rang de l’auteur donne un nouveau prix à cet agréable ouvrage ; un prince qui parle librement des vices et des vertus de ses prédécesseurs, souscrit à chaque ligne aux louanges ou à la censure que peut mériter sa propre conduite.

Il se décide à marcher contre les Perses. A. D. 362.

Dans les momens paisibles de la réflexion, Julien donnait la préférence aux vertus utiles et bienfaisantes de Marc-Aurèle ; mais la gloire d’Alexandre enflammait son ambition, et il recherchait avec une égale ardeur l’estime des sages et les applaudissemens

  1. Julien avait une disposition secrète à préférer les Grecs aux Romains ; mais lorsqu’il rapprochait sérieusement un héros d’un philosophe, il sentait que le genre humain doit plus à Socrate qu’à Alexandre. (Orat. ad Themist., page. 264.)