Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 6.djvu/169

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Thrace ; mais ses entreprises furent partout repoussées par une défense vigoureuse et bien conduite ; et ses soldats, manquant de subsistances, furent bientôt réduits à se nourrir de l’herbe qui croissait autour des remparts. Regrettant trop tard l’abondance des provinces de l’Asie, le chef des rebelles résolut, dans son désespoir, de forcer le passage de l’Hellespont. Il manquait de vaisseaux ; mais les forêts de la Chersonèse offraient abondamment de quoi construire des radeaux ; et les intrépides Barbares ne craignaient pas de se confier aux vagues : [23 déc.]mais Fravitta épiait attentivement l’instant de leur entreprise ; et, dès qu’il les vit au milieu du canal, les galères romaines[1], serrées l’une contre l’autre, et pressées à la fois par les rames, le courant et un vent favorable, vinrent tomber sur la flotte avec un poids irrésistible. L’Hellespont fut couvert en un instant des débris des radeaux et des cadavres flottans des Barbares. Après avoir vu périr ses plus braves soldats. Gainas, forcé de renoncer à ses espé-

  1. Zosime (l. V, p. 319) donne à ces galères le nom de Liburniennes, et observe qu’elles égalaient, par la rapidité de leur course, les galères à cinquante rameurs ; mais il n’en explique point la différence. Il convient cependant qu’elles n’égalaient pas celles qu’on nommait trirèmes, dont on ne faisait plus d’usage depuis long-temps. Il suppose avec raison, d’après le témoignage de Polybe, qu’on avait construit dans les guerres puniques des vaisseaux beaucoup plus grands. Depuis l’établissement de l’Empire romain sur la Méditerranée, la construction des grands vaisseaux fut négligée comme inutile, et bientôt tout-à-fait oubliée.