Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 6.djvu/177

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à la haine des ennemis de Dieu et de l’Église, et s’exprimait quelquefois avec trop de violence dans la parole et dans le maintien. Par des motifs de santé ou peut-être d’abstinence, l’archevêque conservait son ancienne coutume de prendre son repas en particulier, et cette habitude[1], que ses ennemis attribuaient à l’orgueil, contribuait au moins à nourrir son humeur morose et insociable. Renonçant en quelque façon à ces communications qui éclaircissent et facilitent les affaires, il mettait toute sa confiance dans le diacre Sérapion, et se servait rarement de ses connaissances spéculatives de la nature humaine pour approfondir le caractère de ses égaux ou de ses subordonnés. Se fiant à la pureté de ses intentions, ou peut-être à la supériorité de son génie, l’archevêque de Constantinople étendit la juridiction de la ville impériale pour étendre celle de ses soins épiscopaux. Cette conduite, que les profanes imputaient à l’ambition, paraissait à saint Chrysostôme un devoir sacré et indispensable. En visitant les provinces d’Asie il déposa treize évêques de Lydie et de Phrygie, et déclara indiscrètement

  1. Palladius, t. XIII, p. 40, etc., défend très-sérieusement l’archevêque : 1o. il ne buvait jamais de vin ; 2o. la faiblesse de son estomac exigeait un régime particulier : 3o. les affaires, l’étude ou la dévotion, le faisaient souvent jeûner jusqu’au coucher du soleil ; 4o. il détestait le bruit et les conversations oiseuses des grands repas ; 5o. il épargnait sur la dépense de sa table pour secourir les pauvres ; 6o. il craignait, dans une ville comme Constantinople, d’accepter des invitations qui pouvaient le rendre suspect à quelque faction.